Des miniréacteurs nucléaires pourraient voir le jour dans l’Hexagone. Mais pas forcément pour injecter de l’électricité dans le réseau, mission déjà accomplie par la cinquantaine de grands réacteurs du groupe public EDF, qui entend d’ailleurs en construire encore.
Comme d’autres start-up, Jimmy Energy s’intéresse plutôt à un nouveau marché. Si cette petite entreprise parisienne veut concevoir un modèle réduit, c’est spécialement pour fournir de la chaleur bas carbone, en circuit court.
Ses clients potentiels : des usines consommant jusqu’à présent du gaz pour leurs procédés industriels, l’une des énergies fossiles responsables du dérèglement climatique. L’entreprise fait valoir une « solution qui répond aux enjeux de décarbonation », soulignant que le secteur de l’industrie génère chaque année près d’un cinquième des émissions totales de gaz à effet de serre en France.
A décarboner en priorité
Cette société de quelque soixante-dix salariés doit son nom à un personnage de dessin animé, Jimmy Neutron. Plus sérieusement, elle est la première, en France, à avoir annoncé, le 29 avril, presque trois ans et demi après sa création, le dépôt d’une demande d’autorisation de création pour un projet commercial de SMR – l’acronyme anglais pour « petit réacteur modulaire ». Demande reçue le 3 mai par le ministère de la transition écologique.
Après démarchage, le porteur de projet avance l’hypothèse d’un premier SMR à Bazancourt (Marne), commune d’environ 2 000 habitants. Il s’agirait d’alimenter en chaleur une usine de Cristal Union. La distillerie de ce groupe agro-industriel est déjà classée Seveso « seuil haut », pour des risques d’accidents majeurs. Elle produit de l’alcool pour les cosmétiques, les spiritueux, ou encore pour des firmes pharmaceutiques ou chimiques. Ce site industriel est à décarboner en priorité, selon le gouvernement : il compte, dans le pays, parmi les cinquante plus gros émetteurs en dioxyde de carbone.
Cristal Union dit explorer « toutes les pistes possibles », y compris l’atome. « Aucun accord n’a été signé » pour le moment, tempère le groupe. Aujourd’hui, il a recours au gaz pour la majorité de ses besoins en vapeur. Il utilise aussi de la biomasse, une énergie renouvelable.
Une date encore très hypothétique
La technologie dite « HTR », celle d’un réacteur à haute température, peut monter jusqu’à 450 °C. « Cette technologie existe déjà », déclare le cofondateur de « Jimmy », Antoine Guyot, citant des expériences en Chine et au Japon. Le polytechnicien de 30 ans ne se prédestinait pas au nucléaire. Pas davantage que son associée, Mathilde Grivet, passée par HEC. Jusque-là, les deux travaillaient comme consultants en cabinet de conseil spécialisé dans le traitement de données, Eleven Strategy. Porte-parole de l’association antinucléaire Robin des bois, Jacky Bonnemains les voit comme des « chercheurs d’aubaine ».
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