Par hasard, lors d’un repas entre amis, Valérie Paturaud entend parler de l’existence d’une mystérieuse cuisinière française qui a passé plus de vingt ans au service du clan Kennedy. Piquée par la curiosité, la romancière plonge dans les archives et découvre alors l’identité d’Andrée Imbert (1907-1999) : une enfant de l’Assistance publique qui, grâce à ses talents culinaires, a été amenée à vivre le quotidien de l’une des familles américaines les plus célèbres et influentes du XXe siècle.
L’écrivaine décidera de faire d’Andrée l’héroïne de son roman : La Cuisinière des Kennedy, récemment paru aux éditions Les Escales. Dans ce récit au long cours, inspiré de faits réels et raconté avec moult détails et anecdotes, on suit l’épopée gourmande d’Andrée Imbert, à cheval sur deux continents. Depuis l’ouverture de son premier restaurant dans un petit village de la Drôme, à la fin des années 1920, en passant par ses années de services en tant qu’employée de maison auprès de personnages célèbres (Albert Camus, les familles Berliet et Gallimard), jusqu’à son départ impromptu pour les Etats-Unis.
Par hasard, elle est alors embauchée, à partir de 1955, pour tenir les cuisines du Kennedy Compound, la luxueuse résidence familiale des Kennedy, à Hyannis Port, dans le Massachusetts. Grâce à la riche correspondance entretenue par Andrée Imbert et sa fille, et en se fondant sur le travail de nombreux biographes, Valérie Paturaud parvient à lever le voile sur l’intimité du foyer de Joseph et Rose Kennedy.
Bombine, gratin de courge et bachiquelles
En coulisses, par petites tranches de vie ordinaires, on assiste aux ascensions politiques de John F. Kennedy (35e président des Etats-Unis) et de son frère, Robert F. Kennedy (sénateur de l’État de New York), avant de vivre, depuis l’intérieur, les remous internes provoqués par leurs assassinats tragiques. On suit alors Andrée Imbert aux fourneaux : lorsqu’elle s’efforce de convertir ses hôtes aux saveurs de la cuisine française, quand elle prépare les gâteaux d’anniversaire ou imagine des menus de gala raffinés.
Entre la poire et le fromage, on l’observe recueillir les confidences des puissants et on s’amuse de découvrir comment cette cuisinière, qui n’avait rien perdu de sa gouaille provençale, demeura, deux décennies durant, la garante du bon goût et du savoir-vivre à la française en territoire yankee. En fin d’ouvrage, la retranscription de quelques fameuses recettes d’Andrée permet d’entrer un peu plus dans la peau du personnage, notamment : une bombine (un ragoût de pommes de terre ardéchois), un gratin de courge et des bachiquelles (des oreillettes à la fleur d’oranger).
La punchline de la cheffe Andrée Imbert à propos des habitudes alimentaires des Kennedy, avant son arrivée : « Du lait, de la glace, de la sauce rouge et tout le reste passe ! »
La recette star Les pâtes au pistou d’Andrée, à base de basilic, de pignons de pin, de parmesan râpé, d’huile d’olive et d’ail pilé.
La Cuisinière des Kennedy, de Valérie Paturaud, Les Escales, 352 p., 21 €.