L’opposition au Venezuela peut-elle détrôner le pouvoir chaviste, en place depuis vingt-cinq ans ? C’est en tout cas ce qu’indiquent les derniers sondages indépendants pour l’élection présidentielle du 28 juillet, qui placent le candidat de la Table de l’union démocratique (MUD), Edmundo Gonzalez Urrutia, en tête, loin devant le président chaviste, Nicolas Maduro, candidat à sa réélection.
C’est la première fois depuis l’arrivée à la tête de l’Etat de M. Maduro, en 2013, que l’opposition unifiée participera à la présidentielle. En 2018, elle avait décidé, faute de garanties, de boycotter le scrutin, qu’elle avait qualifié de « farce électorale », entraînant une abstention massive et une large victoire chaviste.
Résultat de longues négociations, les principaux partis d’opposition ont signé le 17 octobre 2023 à la Barbade un accord avec le gouvernement, censé donner des garanties électorales aux adversaires de M. Maduro. Cet accord devait notamment leur permettre de présenter le candidat de leur choix pour la présidentielle de 2024.
Parcours du combattant
Mais l’inscription d’un candidat a été un véritable parcours du combattant pour la MUD, le pouvoir s’opposant systématiquement aux noms proposés. Maria Corina Machado, vainqueure de la primaire de l’opposition le 22 octobre 2023, a été déclarée inéligible par le Tribunal suprême de justice, officiellement pour avoir soutenu les sanctions américaines contre le gouvernement de M. Maduro. Le gouvernement a ensuite bloqué l’inscription comme candidate de Corina Yoris, la remplaçante de Mme Machado. Enfin, la MUD a présenté en dernier recours Edmundo Gonzalez Urrutia, dont elle a confirmé la candidature le 21 avril.
Quelques jours seulement après avoir été investi candidat, M. Gonzalez Urrutia, ancien diplomate de 74 ans, devançait déjà Nicolas Maduro de plus de 20 points dans les sondages. Selon une étude de l’institut Datincorp, réalisée le 28 avril, il obtient 50 % des intentions de vote, contre 18 % pour M. Maduro. « Le pays entier veut un changement », explique Jesus Seguias, analyste politique et consultant pour Datincorp, pour expliquer cette percée fulgurante.
Edmundo Gonzalez Urrutia était jusqu’à il y a peu inconnu du grand public. C’est sans sortir de chez lui que, en moins de deux mois, il s’est fait connaître dans tout le Venezuela : Mme Machado fait en réalité campagne à sa place, sillonnant le pays depuis plusieurs semaines pour rallier la population à « Edmundo ».
« L’opposition n’aurait pas pu choisir meilleur candidat pour le pouvoir chaviste, c’est d’ailleurs pour ça qu’il n’a pas encore été disqualifié », estime Jesus Seguias. M. Gonzalez Urrutia se distingue en effet de Mme Machado dans son rapport avec M. Maduro, qu’il appelle « Monsieur le président » et avec lequel il prône le recours au dialogue. Maria Corina Machado, elle, se montre beaucoup plus accusatrice et virulente, assurant que le jour où le président quittera le pouvoir, elle fera « tout [s]on possible pour le faire traduire devant la justice ».
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