La Cour suprême israélienne a fragilisé la coalition au pouvoir, en rendant mardi 25 juin une décision attendue, inéluctable : elle impose à l’armée de recruter des étudiants en religion ultraorthodoxes, jugeant illégale l’exemption de service militaire de fait dont ils bénéficient. A l’unanimité, elle assujettit les jeunes haredim (ceux qui « tremblent » devant Dieu) au principe d’égalité devant la loi. Elle exige aussi que l’Etat prive d’une partie de ses subventions leurs yeshivas, ces écoles religieuses rigoristes et coupées du monde, qui continueraient de cloîtrer leurs élèves.
Cette décision met en difficulté le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, qui ne parvient pas à satisfaire ses alliés ultraorthodoxes, en faisant voter une loi qui perpétuerait leur exemption. Mais elle suscite en Israël une forme de soulagement, alors que le pays s’enfonce dans le neuvième mois de sa guerre à Gaza, et que les signes d’une opération d’envergure sur le front libanais se font plus insistants. L’armée estime manquer de 8 000 hommes pour soutenir l’année de guerre à venir. Elle se prépare à allonger la période de réserve et à repousser l’âge d’exemption.
Certains réservistes ont été mobilisés presque sans interruption depuis l’attaque du Hamas, le 7 octobre 2023. Déjà, le pays se projette dans une décennie d’opérations militaire de plus ou moins haute intensité, et l’exemption totale de service accordée aux ultraorthodoxes apparaît comme un archaïsme insupportable à une majorité d’Israéliens.
Dès mardi, l’avocate générale du pays, Gali Baharav Miara, a ordonné à l’armée de recruter immédiatement 3 000 étudiants en religion, parmi près de 80 000 en âge de l’être. Une première étape, alors que moins d’un millier servent aujourd’hui sous les drapeaux. Elle a aussi adressé une mise en garde aux ministères des finances et de l’éducation, tenus par des alliés des ultraorthodoxes : elle leur demande de ne pas encourager les écoles dissidentes, et de couper effectivement une part de leurs subsides.
Préparation d’une loi maintenant l’exemption
Cependant, l’armée n’apparaît pas pressée d’ouvrir si vite un front au cœur d’Israël, en envoyant ses recruteurs à Bnei Brak, la « capitale » des rabbins ultraorthodoxes dans le pays, qui règnent sur quelque 13 % de la population israélienne. Elle y ferait face à de rudes mouvements de désobéissance. Ces rabbins ont permis au Likoud de Benyamin Nétanyahou de demeurer à la tête du gouvernement durant vingt-deux ans au total au fil des trente dernières années : le premier ministre sait ce qu’il leur doit.
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