Le film d’ouverture du Festival de Cannes voit la réalisatrice et actrice française controversée Maïwenn et la star tout aussi controversée de Johnny Depp dans ‘Jeanne du Barry’, sur l’affaire royale entre Louis XV et la courtisane titulaire qui a fait scandale à Versailles…
Avant le début du film d’ouverture de cette année, la scénariste-réalisatrice-actrice française Maïwenn Jeanne du Barryla presse a pu assister à la cérémonie d’ouverture – qui s’est conclue par la citation suivante de George Cukor :
“Le cinéma, c’est comme l’amour – quand c’est bien, c’est merveilleux, quand ce n’est pas bien, ce n’est pas mal quand même.”
De belles paroles, mais gardez à l’esprit que ce bon vieux George n’a pas eu à s’asseoir Jeanne du Barry.
Ce projet de vanité exagéré déguisé en biopic raconte l’histoire de haillons en richesses, de retour en haillons et de décapitation de Jeanne (Maïwenn), la fille illégitime d’un moine et d’un cuisinier. “Elle est venue de rien”, nous dit-on dans la voix off d’ouverture. « Mais les filles qui viennent de rien ne sont-elles pas prêtes à tout ?
Le script de sous-porno ne s’améliore pas beaucoup à partir d’ici.
Après avoir été renvoyée du couvent pour avoir découvert l’érotisme à travers des livres interdits, Jeanne se rend à Paris (“la capitale de tous les espoirs et de tous les dangers”) pour devenir courtisane. Elle gravit rapidement les échelons et gagne une place de favorite de Louis XV (Johnny Depp). Mais la présence de “la créature” comme l’appellent ses détracteurs menace de faire scandale à la couronne, à un moment particulièrement délicat de l’histoire de France…
Libertinage. Scandale. La Révolution française imminente.
D’après les sons des choses, vous pouvez vous attendre à une débauche torride, à des intrigues à gros enjeux ou, à tout le moins, à une accélération du pouls par l’exubérance et la romance. Après tout, la tombe de Jeanne du Barry la stigmatise comme “le péché incarné”…
Mais non. C’est Maïwenn qui a pour mission d’accaparer l’écran le plus possible, au risque de ne rien faire de l’histoire d’un personnage fascinant – celui vu en dernier lieu dans le film de Sofia Coppola Marie-Antoinette. L’action ne s’attarde jamais sur les difficultés de Jeanne ou sur son passage au boudoir et oscille plutôt entre une histoire d’amour familière contre toute attente et une tiède émission de Versailles.
En effet, lorsque Maïwenn décide de se pencher sur la pompe ridicule de la cour (« C’est grotesque ! pourtant, sans aucune mention du contexte historique ni quelques cadres évoquant la Révolution qui se profile, les dérives de l’aristocratie française ne signifient finalement pas grand-chose. Et quand les trois filles caricaturales du roi (India Hair, Suzanne de Baecque, Capucine Valmary) apparaissent à l’écran pour désapprouver leur réputation ternie maintenant que Jeanne est en scène, leur présence laisse présager une comédie OTT qui aurait été bien meilleure à regarder. Le trio se présente comme Mean Girls du 18ème siècle et donne du fil à retordre aux demi-sœurs de Cendrillon; mais encore une fois, ils sont juste là pour passer un peu de temps à l’écran avant de retrouver Maïwenn agissant de manière rebelle et essayant de créer une chimie entre elle et son homme principal.
En parlant de cela, Johnny Depp n’est pas à moitié mauvais dans son premier film post-procès et peut parler français de manière convaincante. Certes, il était autrefois marié à Vanessa Paradis et a la somme totale d’environ 20 lignes ici, mais son casting finit par avoir du sens, surtout si l’on considère Jeanne du Barry le thème du statut aux yeux du public et de la réputation ternie. Dommage que le casting potentiellement audacieux ne porte pas ses fruits, car il n’y a pas d’étincelle perceptible entre lui et Maïwenn.
Jeanne du Barry n’est pas le pire film que vous verrez de l’année, loin de là. Il fait peu de chose et en dit moins sur quoi que ce soit. En fait, avec la puanteur royale du récent couronnement qui flotte toujours dans l’air, la conclusion centrale surprenante de cette imitation fade de Bridgerton pourrait être que les privilèges de l’ancien monde de la monarchie française semblent en quelque sorte moins désuets au 18ème siècle qu’au la Bretagne actuelle.
“C’est grotesque” en effet.
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