Qu’importe que les élections législatives risquent fort de bouleverser les équilibres politiques et le visage du prochain gouvernement, et que la publication du décret transformant les concours et la formation des enseignants avant le second tour, le 7 juillet, soit peu probable. Le ministère de l’éducation nationale continue d’œuvrer à l’élaboration de cette réforme phare, promise par Emmanuel Macron pour 2025, et dont les textes doivent être soumis au vote du comité social d’administration, principale instance du dialogue social, le 27 juin.

Aux nombreuses réserves et oppositions que suscite déjà ce projet s’ajoute ainsi, depuis le 4 juin, une crainte née de la divulgation du premier exemple de sujet pour le futur concours de professeur des écoles (CRPE). Ce « sujet 0 » doit traduire le nouveau format et calibrer les exigences des épreuves écrites, que les candidats ne passeront plus après avoir validé cinq années d’études (master 2), mais avant la fin de leur troisième année (licence 3).

Dans certaines disciplines, les exercices élaborés au ministère de l’éducation nationale ont stupéfié les formateurs qui préparent aujourd’hui les étudiants au CRPE ainsi que plusieurs représentants syndicaux, au point que plusieurs confient avoir cru à un « canular ». C’est notamment le cas en mathématiques ou en histoire-géographie, où les questions consistant à classer des nombres par ordre croissant ou des événements par ordre chronologique (sans les dater), ainsi que celles sous forme de questionnaires à choix multiples, ont interpellé par leur apparente facilité. L’indignation naît cependant moins du niveau de connaissances requis que du format des exercices.

« L’actuel CRPE s’appuie sur des notions exigées au brevet, mais on demande aux étudiants de faire preuve de davantage de recul, de chercher, de conduire des raisonnements, explique Laure Etevez, formatrice en mathématiques à l’institut national supérieur du professorat et de l’éducation (Inspé) Centre-Val de Loire. Là, il n’y a que de l’application directe, des questions très mécaniques, presque pas de rédaction ». Selon cette professeure, qui se dit « affligée », l’épreuve proposée n’est ainsi « même pas du niveau brevet », et le positionnement du concours deux ans plus tôt ne peut constituer une explication suffisante : « Après un bac + 3, on peut quand même espérer que des étudiants fassent plus que ça ! »

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« Décalage »

Même sentiment sur l’histoire-géographie, incluse dans une épreuve de polyvalence où sont évaluées quatre autres disciplines (arts, éducation physique et sportive, sciences et technologies, et langues). Les exercices proposés consistent essentiellement à donner des définitions, et la principale question supposant un développement attend une réponse de « 5 lignes ». « Le décalage est énorme entre l’ambition qu’on prête à cet enseignement, qui doit participer à la formation d’un citoyen éclairé, et cette épreuve qui consiste juste à vérifier que le candidat maîtrise un savoir minimal sans aucune rédaction », déplore Marie Boulogne, formatrice à l’Inspé d’Amiens, pour qui cette épreuve ne cherche pas à garantir « l’autonomie intellectuelle » des futurs enseignants.

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