En ce 26 janvier, le président sud-africain a rendez-vous avec l’histoire. Alors que la Cour internationale de justice vient de valider – sans se prononcer sur le fond – la requête de l’Afrique du Sud, qui avait accusé Israël de commettre un génocide à Gaza, Cyril Ramaphosa entérine cette victoire dans un discours à la nation. « Certains ont dit que nous devrions nous mêler de nos affaires et ne pas mettre le nez dans celles d’autres pays. D’autres ont dit que ce n’était pas notre rôle, mais c’est exactement notre rôle, en tant que peuple qui ne connaît que trop bien la douleur d’être dépossédé, discriminé, et la violence d’Etat. Nous sommes aussi un peuple qui a été victime du crime d’apartheid », déclare-t-il, solennel. Après cinq années d’un mandat difficile, lui qui a si souvent été critiqué sait qu’il a derrière lui, cette fois, un pays fier de reprendre sa place de vigie morale sur la scène internationale.

Difficile de ne pas se souvenir de ce qu’écrivait Nelson Mandela en décembre 1993 : « Les droits humains seront la lumière qui guide notre politique internationale. » Libéré en 1990 après vingt-sept années d’emprisonnement, Nelson Mandela mettra fin, en avril 1994, à près d’un demi-siècle d’oppression raciste en remportant les premières élections libres, sous les yeux du monde qui admire le « miracle » sud-africain.

Trente ans plus tard, son parti, le Congrès national africain (ANC), est toujours aux manettes. Mais cette formation peut-elle encore se réclamer de l’autorité morale d’un Nelson Mandela ? Alors que l’Afrique du Sud s’apprête à se rendre aux urnes le 29 mai pour élire ses députés, l’ANC pourrait perdre sa majorité absolue pour la première fois depuis la fin de l’apartheid. Chômage massif, criminalité record, corruption, déliquescence des infrastructures… tous les indicateurs sont au rouge. « L’électricité, l’eau, les transports, tout s’effondre… Si l’Afrique du Sud continue sur cette trajectoire, elle risque de devenir un Etat en faillite, car rien ne pourra retenir le pays malgré la robustesse du secteur privé, qui couvre jusque-là la mauvaise gestion et le manque de transparence du gouvernement de l’ANC », met en garde l’économiste Lumkile Mondi, professeur à l’université du Witwatersrand, à Johannesburg.

Fossé grandissant

Symbole le plus évident du déclin qui guette, l’incapacité de la compagnie publique d’électricité, Eskom, à fournir au pays le plus industrialisé d’Afrique l’électricité dont il a besoin. Faute de pouvoir répondre à la demande, Eskom impose depuis 2007 des coupures de courant. Longtemps occasionnelles, elles ont vu leur nombre bondir au cours des deux dernières années. En 2023, le pays a ainsi connu 335 jours d’un délestage qui peut durer jusqu’à douze heures par jour. La compagnie publique d’électricité, qui passait autrefois pour l’une des plus performantes du continent, est devenue le symbole de la corruption et de la gestion inepte qui a marqué les mandats de Jacob Zuma, président de 2009 à 2018.

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