Afin de garantir la stabilité et de doter le pays d’un budget, le premier ministre, Sébastien Lecornu, a proposé de suspendre la réforme des retraites de 2023, renvoyant la question de l’âge et de la durée de cotisation après l’élection présidentielle de 2027. Dans un climat de défiance démocratique comme de fragilités géopolitiques et financières, veillons à ce que cette échéance majeure ne soit pas accaparée par la seule question de la retraite. Préparons dès maintenant les bases d’un débat plus serein en montrant que la démographie nous oblige à travailler plus longtemps, mais qu’il faudra également travailler mieux.
L’importante réforme de 2010, qui a porté l’âge légal de départ à la retraite de 60 ans à 62 ans, a été durement contestée, mais elle a été confortée par la réforme Touraine de 2014 et n’a jamais été remise en question depuis lors. La réforme de 2023, elle, provoque un débat sans fin qui semble faire peu de cas du diagnostic inquiétant dont les données démographiques et financières sont pourtant bien connues depuis le Livre blanc de Michel Rocard de 1991. Aujourd’hui, malgré 25 % de la dépense publique et un taux de cotisation de 28 % des salaires, le déséquilibre du système par répartition s’aggrave, minant la confiance des Français.
Le débat se cristallise sur l’âge légal, négligeant le retard de la France en ce qui concerne l’activité des plus de 60 ans. Notre faible durée annuelle de travail, liée au départ précoce des seniors et à l’insertion tardive des jeunes, n’est compensée ni par la compétence ni par la productivité, la France se situant respectivement aux 24e et 27e rangs parmi les 38 pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques.
Pourtant, c’est bien le recul de l’âge légal depuis 2010 qui a permis d’augmenter l’âge moyen de départ à la retraite et donc le taux d’activité des plus de 60 ans. Mais la nécessité de travailler plus longtemps ne peut s’imposer de la même manière à tous. Un cadre d’assurances pourra partir très probablement à la retraite à taux plein, tandis qu’un ouvrier du bâtiment ou une aide à domicile risqueront davantage de quitter le travail pour inaptitude avant l’âge requis – de 20 % à 25 % d’entre eux sont déclarés inaptes avant 60 ans.
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