
Le procès de dix personnes jugées pour cyberharcèlement à l’encontre de Brigitte Macron, cible d’une infox mondiale selon laquelle elle serait une femme transgenre, s’est ouvert, lundi 27 octobre, devant le tribunal correctionnel de Paris.
Elu, galeriste, enseignant, médium, ou encore informaticien : huit hommes et deux femmes ont commencé à défiler à la barre, par ordre alphabétique, aux alentours de 17 h 30 après d’âpres débats de procédure devant une salle comble. Agés de 41 à 60 ans, les prévenus sont soupçonnés d’avoir tenu à l’égard de Brigitte Macron de nombreux propos malveillants sur son « genre », sa « sexualité », assimilant sa différence d’âge avec son mari à de la « pédophilie », selon le parquet de Paris.
L’enquête pour cyberharcèlement a été confiée à la brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) à la suite d’une plainte déposée par Brigitte Macron le 27 août 2024, conduisant à plusieurs vagues d’interpellations, notamment en décembre 2024 et en février 2025.
Absente du procès, l’épouse du chef de l’Etat a dit aux enquêteurs que la rumeur avait eu « un très fort retentissement » sur son entourage et sur elle-même, rapportant que ses petits-enfants entendaient dire que « leur grand-mère est un homme ». Sa fille, Tiphaine Auzière, doit témoigner mardi à la demande de l’avocat de sa mère.
Parmi les prévenus, le publicitaire Aurélien Poirson-Atlan, 41 ans, connu et suivi sur les réseaux sociaux sous le pseudonyme de Zoé Sagan. Son compte X, suspendu depuis, a fait l’objet de plusieurs plaintes et est souvent présenté comme lié aux sphères complotistes. Lors d’une suspension de séance, lundi, il a donné une conférence de presse improvisée, dénonçant un « harcèlement inversé ».
Outre ses propos visant Brigitte Macron, Zoé Sagan est connu pour avoir diffusé sur les réseaux sociaux les vidéos à caractère sexuel de Benjamin Griveaux, macroniste qui avait renoncé, en février 2020, à briguer la Mairie de Paris pour le parti présidentiel à la suite de ce scandale.
Droit au silence
La « médium », « journaliste » et « lanceuse d’alerte » de 51 ans, Delphine J., connue sous le pseudo d’Amandine Roy, a souhaité exercer son droit au silence à la barre, expliquant qu’elle s’était déjà longuement « exprimée ». Elle a largement contribué, en diffusant une vidéo virale de quatre heures en 2021 – et depuis retirée – à relayer la rumeur selon laquelle Brigitte Macron, née Trogneux, n’aurait jamais existé et que son frère Jean-Michel aurait pris cette identité après avoir transitionné.
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Suivie par près de 20 000 personnes sur X, elle avait aussi trouvé « excellent » un tweet de l’influenceuse trumpiste Candace Owens, posant avec un T-shirt portant une couverture du magazine Time détournée où Brigitte Macron apparaît en « homme de l’année ». Lors de l’annonce du petit rôle donné à la première dame dans une saison de la série Emily in Paris, Delphine J. avait enragé : « Boycottez-moi cette merde. » Delphine J. n’a fait que « rebondir sur l’actualité », selon son avocate, Maud Marian, ajoutant qu’« aucun message n’a[vait] directement été adressé à Mme Macron ».
Condamnée pour diffamation en première instance en septembre 2024 par la justice française, aux côtés de Natacha Rey, à payer plusieurs milliers d’euros de dommages et intérêts à Brigitte Macron et 5 000 euros à son frère Jean-Michel Trogneux, elle a été relaxée en appel le 10 juillet. La cour d’appel n’a toutefois pas validé la thèse des deux femmes. La juridiction a estimé que l’affirmation selon laquelle Brigitte Macron aurait « effectué une transition de genre sans la rendre publique » ne constituait pas « une atteinte à l’honneur », éléments nécessaires pour caractériser la diffamation. Brigitte Macron et son frère se sont pourvus en cassation contre cette décision.
Autre prévenu dans l’affaire, Jérôme A., 49 ans, explique à la barre avoir effectué une recherche sur Grok, l’intelligence artificielle de la plateforme X, peu avant l’audience. Selon cet informaticien, il existerait « six millions » de publications sur la compagne du chef de l’État. Il est poursuivi pour avoir diffusé une dizaine de tweets « sarcastiques » à son sujet. « Une personne puissante doit accepter la critique », justifie-t-il. « Dire “la bite à Brigitte Macron”, c’est une critique ? », s’interroge la présidente.
Poursuites aux Etats-Unis
« C’est le procès de la liberté d’expression, j’ai fait de la satire, c’est l’esprit Charlie », a affirmé à l’Agence France-Presse (AFP) Jérome C. 55 ans, un autre prévenu, auteur de « quatre tweets et quelques retweets ». Bertrand S., galeriste de 56 ans aux plus de 100 000 abonnés sur X, a dénoncé la veille de l’audience sur X un procès de « la liberté de penser » face à « l’État profond médiatique ».
L’écart d’âge de vingt-quatre ans entre les époux Macron a servi de prétexte à propager cette rumeur qui s’est exportée bien au-delà du pays. Née dès l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, l’infox transphobe est devenue virale aux Etats-Unis, où le couple présidentiel a engagé cet été des poursuites contre la podcasteuse d’extrême droite Candace Owens, autrice d’une série de vidéos intitulée Becoming Brigitte (« Devenir Brigitte »).
Plusieurs personnes jugées à Paris ont relayé les publications de l’Américaine, se réjouissant de voir « l’affaire Brigitte » s’internationaliser. Les prévenus encourent deux ans d’emprisonnement. L’audience reprendra mardi à 10 heures.


